INSTRUMENTAL FLAT
Avec l’explosion démographique et la concentration des activités dans les centres, un nouvel enjeu territorial émerge qui est celui de l’expansion toujours plus rapide des villes et de leur réseau de connectivité. Dans ce processus de transformation du territoire, l’architecte doit ajuster son mode de planification à ces nouveaux enjeux, en adaptant les structures et infrastructures urbaines à ces nouvelles conditions de vie. Ainsi, avec ces changements apparaissent de nouvelles problématiques quant à l’habitabilité de ces espaces, et elles se situent entre les échelles urbaines et architecturales. Le projet d’architecture se situe donc dans un rapport affectif entre le lieu, le temps et la condition humaine. La question de la pollution sonore des zones habitables urbaines, conséquence directe du développement de la ville et de ses réseaux, et la saturation du paysage sonore engendrée du même coup, est donc un sujet central du rapport affectif de l’homme à son environnement.
En utilisant le son, sens le plus intime et élément premier de notre structure spatiale et affective, comme « seuil » entre un corps et un lieu, comment donner une réponse architecturale à ces nouvelles problématiques ? Nous proposons donc, à travers une approche à la fois théorique et pratique de la discipline, de présenter un projet sur lequel l’agence Gitai architects a récemment travaillé. Il s’agit d’un projet interdisciplinaire qui propose de résoudre, grâce à une micro-technologie adaptée, ce problème, au regard de l habitat. Le projet « Streets of London » tente de requalifier l’espace habité comme partie intégrante de la structure sociale urbaine, en le projetant vers le dehors afin d’éviter son repli. C’est une transformation de l’environnement acoustique en un espace sensible particulier qui permet de réajuster notre expérience à l’existant, à l’extérieur et au réel. En transformant le bruit de la ville en medium sonore qualitatif, on donne accès à des imaginaires esthétiques forts, qui permettent de jouer sur la perception sensible et même sur la redéfinition de l’espace du logement. En accédant au paysage mental, il permet ainsi de remodeler l’environnement intime, d’en agrandir sa perception, et d’en améliorer le confort sonore. A la manière d’un musicien, on récupère la matière existante, en temps réel pour la recomposer en un milieu harmonieux et habitable. De manière technique, on utilise la fenêtre comme surface physique de transformation du milieu sonore. Elle n’est plus seulement un élément d’isolation face à la rue mais reconnecte l’intérieur et l’extérieur, en adaptant le seuil de tolérance de l’habitant au « bruit » de la ville. La typologie du bow-window est retravaillée dans une approche sensible ; l’appartement devient un instrument habitable. La conséquence de cette réflexion est donc la reconstruction d’un nouveau type de tissu urbain à travers la recréation d’un nouveau mode d’environnement sonore et mental. Cela donne naissance à une autre forme de nature, celle d’un paysage contemporain d’expression, d’évocation et de contemplation. Une nature qui ferait cohabiter différentes entités en un tout, et qui se manifesterait dans diverses dimensions.
